Sortir du traumatisme
Sortir du traumatisme
- Geoffroy David
- 20 févr. 2021
- 4 min de lecture
Ma définition du trauma :
C’est l’évènement extérieur réel, situé dans l’espace et le temps qui menace l’intégrité physique et/ou physiologique de la personne provoquant chez elle un enjeu de survie.
Ma définition du traumatisme :
C’est l’état psychique et émotionnel généré par la perception de l’évènement. Il s’agit d’un état physiologique de stress d’origine interne déclenché par un trauma passé. Il se caractérise par un système de défense permanent et des émotions actives avec la sensation d’un danger toujours présent.
Il est donc important de distinguer l’évènement réel et le ressenti de la personne. Plusieurs personnes vivant le même évènement jugé traumatique ne seront pas impactées de la même façon. Certaines ne seront peut-être même pas traumatisées du tout. Par ailleurs, une personne peut être traumatisée par un évènement qui n’a rien de traumatique pour le reste du monde.
Qu’est-ce qui fait qu’un évènement passé, parfois ancien, reste émotionnellement actif ?
Ce peut être le cas lorsque la personne a installé un sentiment profond, voire un lien d’identité avec la personne, le lieu ou l’objet en jeu dans l’évènement (deuil traumatique, perte ou transformation violente de l’objet de ses sentiments ou d’une partie de soi…)
Mais bien souvent la personne traumatisée n’a aucun lien sentimental avec l’évènement, et pourtant l’émotion demeure toujours aussi forte.
Le trauma est un évènement qui provoque chez la personne un enjeu de survie. Cela illustre la dimension, la violence de la menace vécue, le plus souvent accrue par un phénomène de surprise qui vient intensifier la force de l’émotion. Cet enjeu de survie couplé à la surprise peut laisser à penser que le vécu de l’évènement ne s’inscrit pas dans la même zone du cerveau que le reste du vécu (plus normal). Il est possible que le cerveau reptilien, primitif garde une marque, comme une cicatrice au milieu de cette zone réflexe. Cette cicatrice maintenant cette zone en alerte permanente encourage le développement du système de défense et une sensation toujours présente de danger.
Cela peut expliquer la profondeur et la permanence du souvenir de l’évènement traumatique, comme une sensation désormais ancrée dans les gènes et l’identité, ainsi que la difficulté d’exprimer et d’éteindre ce brasier avec les outils et schémas usuels du cerveau comme le traitement des souvenirs et des évènements « normaux ».
L’évènement tel qu’il est perçu, ressenti et interprété par la personne n’étant pas acceptable et compréhensible pour sa « carte du monde », il ne peut s’y intégrer et va continuer de planer librement et durablement au-dessus de celle-ci, à moins d’être enfoui sous un refoulement ou une amnésie.
Exploration
« On ne peut avoir du pouvoir que sur ce que l’on connait »
Celle-ci dépend évidemment de la « matière » apportée par la personne, si le traumatisme est identifié ou non, le type et la forme de celui-ci etc… L’exploration peut être chronologique, géographique, relationnelle, affective, mais l’objectif reste le même, identifier le trauma (temps, lieux, circonstances…) et tous les liens qui ont été installés avec le traumatisme (croyances, généralisations, histoires parallèles…)
Purge émotionnelle
« Les émotions fortes sont un frein à la lucidité et à la rationalisation »
Elle consiste dans un premier temps, pour la personne, à se défaire de tous les éléments qui ont été rattachés au trauma mais qui ne lui appartiennent pas afin de mieux le circonscrire. Dans un second temps, elle l’amène à se défaire de toutes les émotions encore actives, à les rendre à l’évènement pour s’en débarrasser. En plus d’alléger le réservoir émotionnel et de stopper l’auto-alimentation de celui-ci, la « purge émotionnelle » apporte au client la lucidité suffisante pour rationaliser l’évènement.
Double dissociation
« On ne peut se rassurer que par l’expérience »
Elle permet à la personne de se maintenir au rang de spectateur, en se garantissant des émotions fortes, en se maintenant dans son « adulte » et toutes ses ressources de lucidité, raisonnement, analyse, compréhension etc… Cela lui permet d’observer l’évènement sans le revivre et de ré-apprivoiser l’image du souvenir, de la compléter et de la rationaliser tout en rassurant l’enfant intérieur en se rapprochant de l’image jusqu’à pouvoir la toucher, entrer dedans sans ressentir de surcharge émotionnelle.
« Le souvenir n’est pas la réalité »
Si la personne peut regarder l’image du souvenir de manière plus détachée, celle-ci reste néanmoins très négative et désagréable. Cette image n’est bien sûr pas réelle, elle est seulement la retranscription, l’interprétation émotive d’une réalité. Cette charge émotionnelle étant désormais différente et plus légère, il convient de « redessiner » cette image en conséquence. Cela consiste à modifier les « sous-modalités » (forme, taille, couleur…) afin de rendre l’image du souvenir plus rationnelle, plus douce, plus légère, bref, plus acceptable pour sa « carte du monde ». Une fois l’image convenable, il s’agit de la « rendre objet » afin de reprendre le pouvoir dessus, la déplacer, la ranger etc…
Rangement du souvenir
« Les choses importantes ont besoin d’être rangées pour pouvoir être oubliées »
Maintenant que l’image remplit les critères du simple souvenir (désactivation émotionnelle, complète, rationalisée, décrochée des liens qui la maintiennent dans les croyances et l’identité, réinstallée dans le passé) il s’agit de l’emmener dans la bibliothèque des souvenirs, juste à la bonne place sur la bonne étagère, identifiée et étiquetée. Lorsque l’on sait où se trouve l’information, on peut enfin se permettre de la sortir de sa tête et l’oublier.
Rééducation comportementale
« Le fond et la forme s’influencent mutuellement »
Si le traitement du traumatisme constitue l’essentiel du travail, il n’efface pas des années d’habitudes de déviances ou d’excès comportementaux, or le but final est d’accompagner la personne à vivre d’une façon qui corresponde à sa normalité.
Cette rééducation démarre par l’identification et la prise de conscience de toutes les capacités et ressources positives développées suite à ce trauma afin d’installer un équilibre dans la perception de l’évènement.
Elle se poursuit par l’identification de toutes les déviances comportementales installées par le système de défense et la « re-normalisation » de chacun de ces comportements en recréant du lien et en s’appuyant sur les capacités et les ressources positives éclairées préalablement.
Dans la majorité des cas le traumatisme est traité en 3 à 5 séances. Pour ce qui est de la rééducation comportementale, tout dépend du nombre de comportements à rééquilibrer, de l’ampleur de leur « déviance », des capacités et de l’engagement de la personne dans le processus.